PAUL PERSONNE : Electric Renez-Vous (2015)
Notre Paulo national nous propose un bien beau live (sous la forme d’un pack composé d’un double CD et d’un DVD) qui atteste une fois de plus de ses talents de compositeur et de guitariste. Oui, il s’agit bien d’un rendez-vous électrique avec une avalanche de solos remplis de feeling et de beaux duels de six-cordes, Paul Personne ayant choisi encore une fois une formule à deux guitares pour notre plus grand plaisir. Le deuxième gratteux, Anthony Bellanger, se révèle d’ailleurs comme un maître de la guitare slide. Après un instrumental planant en guise d’intro (« Mystique ouverture »), la première partie du show est surtout axée sur les titres du dernier album. D’entrée de jeu, ça déménage avec le funky « Il y a » (qui se termine en Texas blues) et le blues-rock « Qu’est-ce qui a changé ? ». Paul tape aussi dans les ballades avec « Une journée » (d’inspiration seventies avec un superbe refrain et un solo aérien) et « Partir aujourd’hui » (plus bluesy). Notons également l’excellent travail à la tierce des deux guitaristes sur « Loco loco » et « M’envoler plus haut » où Paul Personne nous gratifie d’un solo éblouissant. Notre guitariste tâte de la slide sur l’intro du slow « Pour quelle bonne raison ? » et repart dans le blues-rock avec « La croisée des ch’mins ». Ensuite, il nous replonge dans la nostalgie des années 80 avec des titres d’environ dix minutes mais sans aucune longueur. « Comme un étranger » commence en blues pour s’orienter vers le jazz/swing. « Faut que j’me laisse aller » débute comme une lente ballade puis s’accélère avec des phrases de guitare à la tierce et la slide héroîque d’Anthony Bellanger. En écoutant les arrangements de ce morceau, on se dit qu’il est impossible que les deux guitaristes n’aient jamais entendu parler de l’Allman Brothers Band. Un vrai régal ! « Barjoland » ne laisse pas sa part au chat avec Paul qui démarre seul avec la batterie et qui égrène quelques riffs connus de la « rock music » comme « Sunshine of your love » ou « Satisfaction ». Le public apprécie en connaisseur. Bien sûr, il y a d’autres chansons, toutes excellentes. L’instrumental « Flashes » qui sonne très Allman avec ses guitares à la tierce. « Quelqu’un appelle » qui cartonne bien avec son duel de guitare et Paul à la pédale wah wah. Le long blues de douze minutes, « Faire semblant », durant lequel on ne s’ennuie pas une seule seconde. Et d’autres encore. Le spectacle se termine avec du rock à fond la caisse. En introduction de « C’est la vie qui m’a fait comme ça », Paul envoie un solo « killer » qui démontre, si besoin était, sa maîtrise technique. Le DVD permet d’apprécier le jeu tout en finesse de l’artiste, fidèle à la Gibson LesPaul (malgré une courte incartade avec une Gibson SG équipée d’un vibrato). Anthony Bellanger reste scotché à sa Gibson SG, que ce soit en jeu classique ou en slide. Son frère martèle sa basse comme un chef et le batteur frappe avec discernement et maturité, tour à tour délicat ou puissant selon l’ambiance des morceaux. En résumé, un super concert d’un très bon guitariste français qui, depuis le début, a choisi de s’exprimer dans sa langue maternelle et qui sait restituer sur scène le climat attachant de ses disques. Je sais que beaucoup de rockers lui reprochent la poésie très imagée de ses textes mais ça, c’est son style, sa marque de fabrique ; c’est ce qui fait son charme et sa différence. C’est notre Paul Personne, quoi ! C’est pour ça qu’on l’aime. Je me souviens que Bill Deraime avait subi les mêmes critiques à ses débuts. On peut fort bien jouer du blues-rock sans tomber dans les sempiternels clichés des bitures, des gonzesses ou des bécanes.Avec Paul Personne, on apprécie plus qu’un genre musical ; on découvre un autre univers.
Olivier Aubry